Quand Kevin Dutton n’écrit pas pour Scientific American Mind, ne rajoute pas un chapitre à son nouveau livre « la sagesse des psychopathes » (à paraitre en 2012) ou n’étudie pas les dérèglements émotionnels à l’Université de Cambridge, il s’adonne à son activité préférée : suspendre l’esprit critique de son interlocuteur en lui donnant l’illusion de préserver son libre-arbitre.
En d’autre terme, Kevin est un expert en manipulation dans la lignée de nombreux psychologues sociaux qui ont étudié les mécanismes de la persuasion humaine, tel Robert Cialdini aux US ou Nicolas Guégen en France. La supersuasion en est la dimension instantanée, la plus puissante, pour rallier autrui à sa cause. Le modèle SPICE la synthétise en 5 facteurs clés que sont la simplicité, la perception de son propre intérêt, l’incongruité, la confiance et l’empathie.
Comment adapter ces règles à la génération de leads pour obtenir davantage de prospects motivés et engagés dans un premier échange commercial ?
La simplicité : le cerveau humain se laisse spontanément convaincre par ce qui est facile à comprendre ou à déchiffrer. L’écrit étant le premier format d’informations sur le Web, il faut simplifier l’accès au message autant dans la forme que dans le fond. Les psychologues Hyunjin Song et Norbert Schwarz ont constaté que plus une police de caractère est complexe, plus les lecteurs considèrent une tâche écrite dans cette police comme difficile à réaliser. L’être humain est victime d’un biais cognitif : il confond la facilité d’accès à une information et les ressources nécessaires pour l’exécuter. Donc, privilégiez l’Arial pour tous vos contenus.
Quand à la compréhension, la technique rédactionnelle du tricolon utilisée depuis l’Antiquité subdivise un argumentaire en trois propositions : la troisième confirme et complète l’argumentation tout en confirmant la connexion entre les deux premières. Structurer sa proposition de valeur en trois points seulement favorise la mémorisation à court terme et la lecture verticale, mode d’acquisition privilégié par les internautes.
Le cadrage ou perception de son intérêt propre : présenter l’information de manière à ce qu’elle renforce l’anticipation de retombées positives et exclusives. Cette orientation illusoire renforce considérablement le degré d’acceptation et d’engagement de l’interlocuteur.
C’est après le premier contact, par exemple le téléchargement d’un livre blanc, que cette approche sera la plus efficace : avec les informations personnelles collectées, il est beaucoup plus simple de proposer un contenu personnalisé en association avec une promesse de bénéfices.
L’incongruité : nous sommes plus sensibles à la présentation de stimulus inattendus que de stimulus prévisibles ; notre cerveau est programmé pour détecter et traiter la nouveauté.
L’inhabituel provoque une courte période d’instabilité et de perte de repères puis déclenche un recadrage automatique : nous devons accepter de nouveaux points de vue, ce qui nous rend moins craintif et plus réceptif aux suggestions. L’humour est à ce titre un puissant facteur d’influence mais uniquement en face-à-face lorsque vous avez identifié le profil attitudinal du prospect.
Sur un site Web B to B, l’incongruité doit être ponctuelle et située aux endroits stratégiques, c’est-à-dire ceux auxquels on s’attend le moins, comme la présentation d’une méthodologie ou des points forts de l’entreprise. Déstabiliser le prospect au moment où il doit se reconnaître, par exemple à travers des cas clients ou dans l’évocation de ses besoins, génèrera de l’inquiétude liée à un risque perçu. De même, une créativité débridée et systématique provoquera une dissonance cognitive et donc un rejet.
La confiance : nous utilisons une heuristique de confiance pour accélérer et arbitrer nos décisions.
C’est une attribution positive indépendante de la réalité et transmise inconsciemment à travers l’apparence, le langage ou les croyances. Nous sommes donc très loin de la vérité.
La crédibilité de l’émetteur d’un message est plus importante que le message lui-même : c’est l’effet de source qui contribue à la persuasion. Il est donc crucial de développer une stratégie de confiance à partir de référents externes incontestables, tant au niveau de la preuve de fiabilité de son offre que des individus qui la produisent. Invoquer des sources reconnues dans un argumentaire, qu’on les ait au mieux fréquentées ou au pire simplement citées, peut souvent suffire. Etudier les principales croyances de ses cibles et aller dans leur sens est un autre moyen de gagner leur confiance.
L’empathie : notre capacité à partager et comprendre les états émotionnels et affectifs de l’autre. Produire de l’empathie, c’est s’identifier à autrui et donc générer à la fois un sentiment de familiarité et une impression de similarité. Dans le premier cas, le degré d’empathie que l’on éprouve pour autrui est directement influencé par son appartenance à des groupes sociaux proches du sien. Organismes professionnels, réseaux sectoriels, métiers ou géographiques, hubs et communautés professionnelles, médias sociaux communs : une participation même symbolique à des groupes fréquentés par ses prospects peut modifier leurs croyances.
Dans le second cas, quel est le sentiment le mieux partagé en B to B lors d’un processus d’achat ? L’anxiété provoquée par le risque de prendre une mauvaise décision. Faire parler ses clients sur le diagnostic de leur problématique et retranscrire les questions qu’ils se sont posés lors du choix de la solution est une démarche possible pour générer une empathie indirecte.
Mais c’est par l’analyse de leurs comportements au cours du processus de lead management que l’on peut se projeter le plus efficacement sur l’évolution de leurs besoins et attentes.
Commentaires